Cet essai explore le lien entre vulnérabilité, dépendance, violence et pouvoir, notamment à partir d'enquêtes ethnographiques menées sur des conflits vil- lageois en Nouvelle-Calédonie et sur une milice paysanne au Katanga, mais aussi de l'analyse de textes anthropologiques, philosophiques et littéraires.
L'auteur présente une anthropologie politique renouvelée : de la violence, de la pré- dation, du capitalisme, interrogeant la fragilité de la reproduction sociale ainsi que nos rapports avec l'environnement. Pour ce faire, il assume un point de vue, celui de la vulnérabilité, c'est-à-dire de l'exposition à la violence en ce qu'elle implique les subjectivités, les affects, les émotions et les pensées des personnes entraînées dans des situations de crise et de trouble.
Les sciences sociales peuvent-elles décrire la vulnérabilité, l'incertitude, la désaffiliation, la solitude ? De tels objets supposent pour l'anthropologie d'assumer sa prise de réel dans l'enquête ethnographique, dans l'interaction, à travers une approche pragmatique mettant en cause le statut du témoignage.
Au cours des dix dernières années le paysage de l'édition en sciences humaines et sociales a été considérablement bouleversé. Les transformations du marché du livre, l'essor de la publication et de la lecture en ligne et l'évolution de l'évaluation scientifique ont profondément modifié la production et la diffusion du savoir, tout comme les modèles économiques et l'organisation du travail qui les sous-tendaient. Cet ouvrage revient sur les nombreux débats au sein du monde savant, mais aussi dans la sphère publique, en France comme au niveau international.
Les sciences sociales, lorsqu'elles oublient leur vocation critique, ne produisent plus que de simples discours idologiques, ou d'expertise, prompts conforter la pense commune.
La perspective d'une légalisation du mariage et de l'adoption pour les couples de même sexe a suscité ces derniers mois des réactions parfois viscérales. Les questions légitimes qu'elle soulève ne doivent être ni éludées ni instrumentalisées.
Le 29 octobre 2012, l'Union nationale des associations familiales (Unaf) a publié un " dossier d'analyse " du projet de loi sur l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe, sous le titre Les questions du mariage, de la filiation et de l'autorité parentale pour les couples de même sexe. L'Unaf s'y oppose majoritairement, alors qu'au contraire les auteurs de ce livre le soutiennent.
Les trois grands objectifs des auteurs sont les suivants :
- contexte : présenter le contexte international en matière de droits des couples de même sexe et replacer le projet de loi dans la perspective du temps long de l'histoire du mariage et de la filiation en France ;
- analyse : examiner les points du texte qui font l'objet de controverses ainsi que les principaux amendements annoncés (AMP pour les couples de femmes, adoption pour les couples non mariés, etc.) ;
- ouverture : débattre des alternatives au projet de loi qui ont été proposées (union civile, etc.) et analyser la façon dont ce projet s'inscrit, ou devrait s'inscrire, dans une réforme plus globale de la filiation contemporaine.
L'affaire Bomarzo est une histoire de censure : la censure, par la dictature argentine en 1967, d'un opéra d'Alberto Ginastera et Manuel Mujica Lainez, accusé de "référence obsessionnelle au sexe, à la violence et à l'hallucination".
Ainsi, Bomarzo reste à ce jour l'emblème des persécutions idéologiques de la dictature militaire. D'abord soutenue par le général Ongania lors de sa création à Washington, cette oeuvre de musique contemporaine est, quelques mois plus tard, brutalement exclue de la scène musicale de Buenos Aires par ce même régime. Ses auteurs, pourtant plutôt conservateurs, sont rejetés, condamnés, traités de pervers.
Aussi haletante qu'un thriller, la chronique de ce scandale nous fait revivre l'ampleur et la complexité du débat suscité par l'interdiction, et interroge le rôle de l'église et de l'Etat comme régulateurs des rapports entre l'art et la morale. En observant le comportement des artistes et des intellectuels pendant ces années sombres, Esteban Buch dévoile les engagements et les compromissions de l'ensemble de la société argentine et, plus largement, éclaire les rapports entre musique et politique au XXe siècle.
Le philosophe constitue l'une des figures les plus remarquables de la vie intellectuelle française. De Bergson à Foucault en passant par Sartre, il est l'ambassadeur à l'étranger d'une forme de "francité", paradoxale pour celui qui s'est installé d'emblée dans une perspective universelle. Au cours du XXe siècle, la discipline qui venait couronner l'enseignement secondaire classique a connu à la fois le succès mondial d'un style de pensée et les affres du déclassement institutionnel en France. Ce récit vivant décrit au plus près ce qu'est la philosophie française: une construction conceptuelle, dont toutes les lectures et réceptions sont à prendre en compte, une institution et des pratiques sociales, de la salle de classe à la scène médiatique. Ce livre est aussi un hommage, ironique et quelquefois impertinent, à ceux qui ont fait une bonne part de notre histoire culturelle.
La disparition du grand historien en 2014 a suscité une grande émo- tion, en France et à travers le monde. Des collègues et amis, des anciens étudiants, mais aussi des lecteurs et des auditeurs de Jacques Le Goff, évoquent ici sa mémoire, ses travaux et sa présence dans le siècle.
Notice Jacques Le Goff (1924-2014) a été l'un des très grands historiens de son temps. Il est l'auteur d'une oeuvre immense, consacrée pour l'essentiel à l'histoire du Moyen Âge, qu'il a renouvelée en profondeur. Ce livre en explore les ambitions, les objets et les démarches. Il réunit les contributions présentées à l'occasion d'une journée d'hommage organisée en janvier 2015 par l'École des hautes études en sciences sociales et par la Bibliothèque nationale de France. Aux très nombreux lecteurs de Jacques Le Goff, mais aussi à ses collègues et à leurs étudiants, il permettra de situer l'oeuvre dans le « moment » intellectuel et scientifique des années 1960-1980, de prendre la mesure de son rayonnement international et de rappeler la présence de l'homme public : un homme toujours soucieux de faire connaître les résultats de la recherche à un public élargi, passionné par les médias, mais aussi un citoyen engagé pour les libertés et un défenseur passionné de l'Europe en construction.
Aujourd'hui les frontières sont devenues un lieu de pouvoir sans précédent où s'exerce un contrôle des flux, et où s'élaborent des justifications conflictuelles de ces contrôles. Ce qui s'explique non seulement par des flux migratoires plus massifs qu'auparavant, mais surtout par des flux n'ayant jamais été aussi politisés.
Les frontières des États-nations posent problème. Si elles peuvent protéger les citoyens et garantir la continuité des institutions, elles occasionnent également la mort de milliers de personnes et des formes éparses de domination. Comment penser ce dilemme des démocraties occidentales ? Que faire lorsque la liberté de mouvement ou l'égalité des personnes entrent en contradiction avec des pratiques de fermeture, de discrimination et d'exclusion ? Faut-il redéfinir nos valeurs ou changer nos pra- tiques ? En analysant les différentes résolutions de ce dilemme, depuis le nationalisme souverainiste jusqu'aux propositions d'un monde sans frontières, ce livre déconstruit les logiques qui gouvernent nos débats sur l'immigration et avance des arguments résolument démocratiques pour penser des frontières justes.
Aujourd'hui nous assistons à l'expansion des archives orales dans les ins- titutions publiques et privées, et des projets historiques ou patrimoniaux incluant la constitution de corpus de témoignages oraux. Cet ouvrage retrace la naissance d'une innovation historiographique, l'histoire orale, qui dans le dernier tiers du xx e siècle en France a bouleversé les méthodes des historiens contemporains. Pour Florence Descamps, la source orale est un instrument fécond qui permet de comprendre la façon dont les individus appréhendent et se représentent le monde, dans le temps et dans l'espace.
Dans les années 1980-1990, les notions d'histoire, de mémoire et de patrimoine qui renvoient à trois usages sociaux du passé s'entrecroisent. En facteur commun, vient s'insérer le recours aux témoignages oraux, qu'il relève de l'histoire ou de l'ar- chive. Ces deux pratiques, à l'origine distinctes, vont être repensées pour répondre à la demande sociale de mémoire, faisant de cette dernière un objet d'histoire à part entière. L'ouvrage montre comment la source orale a été introduite dans la boîte à outils de l'historien, comment le tournant des archives orales a fait basculer l'histoire orale naissante dans l'univers du patrimoine, et enfin comment la patri- monialisation des témoignages oraux s'est accompagnée de celle de la mémoire.
En février 1963, à l'heure où l'extrême droite française est en crise, Jean-Marie Le Pen fonde la Société d'études et de relations publiques (Serp). Maison de disque subversive, elle proposera jusqu'en 2000 plus de 200 références de compilations de documents historiques sonores, de chants, de discours politiques ou de musiques militaires. Moyen de survie matérielle et politique de Le Pen avant la création du Front national, moyen de propagande et d'accompagnement de l'expansion du parti ensuite, la Serp fait du disque un agent de diffusion de cultures politiques d'extrême droite.
Dfaut de pouvoir exprimenter, le chercheur en sciences sociales construit ses objets : il les collecte, les classe et les compare, comme l'adepte des sciences de la nature, et s'efforce ainsi de transcender la singularit historique et psychologique de ses observations initiales.
Le 27 décembre 1974 se produit à Liévin, dans le Nord, la plus grave catastrophe minière française de l'après-guerre : elle fait 42 morts. Marion Fontaine se penche sur les différents modes de traitement médiatique, politique, militant, et judiciaire de l'événement, et à travers ce drame, interroge le processus de désindustrialisation.
À travers le « Tri-continent » - espace latino-américain, Moyen-oriental et indien -, les trois auteurs interrogent le fait révolutionnaire. Comment comprendre les passions révolutionnaires ayant vu le jour hors du continent européen ?
Depuis la fin du XVIIIe siècle, l'Europe constitue le théâtre privilégié des passions révolutionnaires. Mais durant la même période, jusqu'aux événements qui marquent le début du xxie siècle, le monde non-européen résonne également d'attentes et de crises révolutionnaires. Comment comprendre les passions révolutionnaires ayant vu le jour hors du continent européen ? Dans quelle mesure ces expériences révolutionnaires ontelles été conditionnées par les matrices européennes auxquelles elles se référaient ? Ont-elles, à leur tour, donné naissance à des modèles exportables ? À travers le « Tri-continent » - espace latino-américain, moyen-oriental et indien -, les trois auteurs interrogent le fait révolutionnaire dans un dialogue constant avec le maître-livre de François Furet Le passé d'une illusion, rétrospective sur « l'idée communiste » publiée en 1995 peu après la chute du Mur de Berlin. Nationaliste, religieuse, prolétarienne, internationaliste, anticoloniale, ou simplement libertaire et égalitaire, vécue pacifiquement ou réprimée dans la violence : au-delà de cette diversité de forme, la révolution, son passé comme son avenir, s'avèrent néanmoins un analyseur de nos sociétés.
Faut-il lever l'anonymat des donneurs dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation ? Alors que les premiers enfants nés grâce aux dons sont devenus de jeunes adultes et, pour certains, revendiquent l'accès à leurs origines, comment distinguer les places respectives des protagonistes du don d'engendrement : parents, enfants, donneurs ? L'enfant n'est-il pas le grand oublié de la perspective médicale traditionnelle assimilant don de gamètes et don du sang, au prix de l'effacement d'une partie de son histoire ? D'une plume résolument engagée, Irène Théry propose un regard critique sur le modèle bioéthique français qui a sacralisé l'anonymat du don de gamètes alors que tant de pays démocratiques ont su passer du modèle initial Ni vu ni connu à celui de Responsabilité où le donneur - homme ou femme - cesse d'être perçu comme un spectre menaçant.
La panique morale qui semble saisir la société française - corps médical, responsables politiques, religieux - devant une telle évolution révèle les préjugés et les résistances face aux nouvelles représentations de l'identité personnelle et de la filiation, transformées par l'égalité des sexes, le démariage et l'émergence sociale de l'homoparentalité.
Cet ouvrage restitue des faits sociaux, des secteurs de la vie quotidienne encore peu connus des régimes communistes, négligés parce que considérés comme marginaux. Une des originalités est de donner la parole, vingt ans après la chute du Mur, à des représentants d'une nouvelle génération d'historiens et de politistes concernée par l'étude du communisme dans les pays satellites de l'URSS. Ils nous donnent ici à voir comment la dissémination du pouvoir dans les institutions, dans les corps et les esprits dressés à l'obéissance laisse une place non négligeable à l'improvisation, à la négociation, et à des ajustements au sein même des institutions, à la mise en place aussi d'une culture voire d'un culte de la débrouillardise. Les réalités quotidiennes de la pénurie et des accommodements économiques ainsi que certains aspects de la condition féminine sont décrites dans ce sens. Est saisie aussi la manière dont les communismes nationaux sont en pratique obligés de bricoler pour asseoir le nouvel ordre politique, sans jamais se préoccuper des contradictions que ce bricolage engendre. Le texte introductif de Rose-Marie Lagrave a le double mérite d'un témoignage personnel et d'une reconstitution historique synthétique concernant le cheminement intellectuel et les transformations politiques et affectives qui ont engendré des recherches comme celles rassemblées dans ce volume.
Le sexe est-il politique ? Avec pour point de départ la comparaison entre les États-Unis et la France, ce recueil offre une synthèse riche des travaux d'Éric Fassin sur les questions sexuelles et leurs représentations.
Le sexe est-il politique ? Non, répondait-on naguère en France : il relève des moeurs. Le sexe n'est-il donc pas politique ? Si, dit-on au contraire dans les années 2000. La liberté et l'égalité sexuelles seraient les emblèmes de la démocratie.
Tel est le renversement qu'analyse ce recueil.
Rythmé par les va-et-vient entre deux sociétés - les États-Unis et la France-, entre disciplines, entre savoir scientifique et représentation sociale, il retrace le parcours d'Éric Fassin et en souligne toute la cohérence.
En partant des controverses qui touchent au genre et à la sexualité dans deux sociétés - États-Unis et France - Éric Fassin analyse l'histoire du concept de genre et sa construction dans l'espace public. Il revient sur la représentation des questions sexuelles, leur mise en discours par le travail politique et juridique, mais aussi scientifique, religieux et littéraire. Il y est question du viol et de harcèlement sexuel, d'amour hétérosexuel et de mariage homosexuel, de reproduction et de famille. On y rencontre Michel Houellebecq et Christine Angot.
Ce recueil démontre aussi le choix assumé et revendiqué scientifiquement d'un chercheur engagé, soucieux de l'articulation entre savant et politique, et attentif aux usages des sciences sociales.
SOMMAIRE Première partie. Circulations du genre 1. Le genre au miroir transatlantique 2. L'empire du genre Deuxième partie. Le genre au travail 3. La nature de la maternité 4. Cultures de l'homosexualité Troisième partie. Controverses sexuelles 5. La politique sexualisée 6. La sexualité politisée Quatrième partie. Politisation et non-politisation 7. Événements sexuels 8. Fluctuat nec mergitur Cinquième partie. Le sexe en représentations 9. Le roman noir de la sexualité française 10. Le double « je » de Christine Angot Sixième partie. Retour sur le savant et le politique 11. Des sciences sociales toujours déjà engagées
Encore étudiant, le doctorant est souvent déjà chercheur et enseignant et n'a pas toujours conscience des enjeux et des mécanismes du contexte dans lequel sa thèse s'inscrit. Car s'il y a de toute évidence des règles du jeu, il y a différentes manières de s'y conformer ou de les contourner. Beaucoup d'aspects de la thèse passent pour évidents alors qu'ils méritent d'être étudiés. Comment y réfléchir à titre individuel quand on est pris dans des enjeux qui nous dépassent ? Et surtout, peut-on tenter d'y répondre collectivement ? Abordant à la fois la situation du doctorant, les publications, l'insertion dans des réseaux de recherche, la présentation orale de son travail, les perspectives de carrières après la thèse, ou encore les différentes facettes de l'engagement du chercheur dans le monde social dont il fait partie, ce livre appréhende la recherche en train de se faire.
Etablir le lien entre, d'un côté, une expérience par définition individuelle, nécessairement conditionnée par la place centrale qu'y occupe l'écriture et qui pousse souvent le doctorant à se remettre en question sur le plan personnel, et de l'autre, le contexte institutionnel de la recherche, par définition collectif, dans lequel les doctorants se sentent souvent laissés pour compte : tel est l'enjeu de cet anti-manuel.
Faire de la recherche et écrire une thèse sont des savoir-faire qui non seulement s'apprennent, mais qui se transmettent : un exercice de réflexivité collectif plus nécessaire que jamais.
Voici la première sociologie du modèle du cinéma français. Olivier Alexandre retourne la perspective habituellement retenue, en interrogeant non plus les fùms mais ceux qui les font. Là où les médias portent la lumière sur une poignée de stars et de réalisateurs, il revient sur le système, les logiques et manière-faire d'un univers dont la puissance de séduction cache une organisation codifiée, essentiellement rigide et stratifiée.
Quelles sont les transformations les plus significatives intervenues dans les sciences sociales depuis 25 ans? Jean-Louis Fabiani croise et confronte une série d'ouvrages français et états-uniens qui ont fait date, et par ses lectures critiques configure un espace de connaissance inédit. Défense et illustration de la notion de leet01; cet ouvrage est aussi une introduction à la sociologie contemporaine. Rendre compte d'un livre, c'est s'installer d'emblée au centre du savoir des sciences sociales.
Entre 2000 et 2010, 11,6 millions de réfugiés sont retournés dans leur pays d'origine, dont 7,4 millions avec l'assistance du HCR. En s'intéressant aux migrations de retour des réfugiés en RDC, de 2006 à 2010, Laurent Lardeux éclaire le traitement politique des migrations forcées par les organisations nationales et internationales.
Face à des politiques migratoires de plus en plus coercitives et à des logiques humanitaires et sécuritaires très largement orientées dans la promotion et la facilitation des retours des réfugiés vers leur pays d'origine, il rend compte de l'agencement des univers sociaux par des acteurs qui contournent, évitent ou utilisent les dispositifs de traitement des flux migratoires selon l'expérience vécue vers le pays d'accueil et leurs différentes ressources potentiellement acquises pendant l'exil. Se dégage une voie intermédiaire entre dispositifs institutionnels et parcours biographiques.
Aujourd'hui les psychiatres intervenant en justice confrontent de plus en plus les malades mentaux criminels à la réponse pénale et au milieu carcéral. Comment expliquer un tel état de fait ? Estimer responsable de ses actes un malade mental, c'est mettre à distance pour une longue période une personnalité jugée dangereuse socialement ; se protéger en tant que professionnel de la récidive d'un individu ;
Se prémunir de la critique des collègues qui ne souhaitent pas prendre en charge dans leur service un malade mental dangereux car il en perturbe l'équilibre.
Caroline Protais s'appuie donc sur un contexte professionnel mouvant pour faire état d'une histoire sociale de la psychiatrie contemporaine.
La tendance à responsabiliser des malades mentaux ayant commis des infractions s'enracine dans les années 1960-1970. Elle est justifiée par des considérations éthiques construites sur le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale dans une posture résolument opposée à la psychiatrie asilaire. Toutefois, l'ampleur et le prolongement de cette tendance dans la période actuelle conduisent à envisager les motivations plus « sécuritaires » de certains psychiatres.
Au croisement entre l'histoire et la sociologie, cet ouvrage permet non seulement une histoire originale de la psychiatrie dans la seconde moitié du xxe siècle, mais également de se questionner sur un sujet fondamental qui travaille les sociétés occidentales depuis leurs origines et qui trouve, par son orientation inédite, une actualité particulière à l'orée du xxie siècle.
Les grimpeurs professionnels sont souvent présentés comme des indivi- dus extrêmement talentueux, voyageant autour du monde afin d'en réa- liser les escalades les plus difficiles ou pour participer à des compétitions prestigieuses tout en signant de fructueux contrats de sponsoring. Plon- geant dans les coulisses de leur quotidien, cet ouvrage étudie comment ils monétarisent les résultats de leur travail en devenant des ambassadeurs de marques.
Ainsi, en les accompagnant lors de la création de nouvelles escalades, mais également lors leur mise en scène et en image, nous nous apercevons que le statut de « professionnel » recouvre en réalité une multitude d'activités de travail pas toujours rémunérées. C'est l'adoption d'une démarche entrepreneuriale combinée avec la marchandisation du soi, où l'organisation du travail comme une micro-organisation n'est pas seulement une nécessité propre au marché mais également une manière d'être au monde et de créer de la valeur au sein d'un réseau relativement stable de collaborateurs, qui se profile comme la forme de travail dominant. En examinant minutieusement ce quotidien, l'ouvrage propose un regard neuf sur les transformations de la nature et de l'organisation du travail indépendant qui affectent, aujourd'hui, de nombreux professionnels.
En 2005, l'ouragan Katrina transforme La Nouvelle-Orléans en ville sinistrée.
Pourtant rompus à ce type de désastre, les habitants désemparés s'attendent à une réponse humanitaire de la part de l'administration de George W. Bush. Mais celle-ci diffère son intervention, préférant assurer une sécurité militaire totale avant d'accepter le déploiement des aides. La polémique enfle, dénonçant la désorganisation étatique, le racisme, le mépris des pauvres et la morgue des élites. Inertie programmée ou raté bureaucratique ? Au-delà du scandale civique, Romain Huret démontre que Katrina est le résultat de la politique sociale de l'Etat contractuel, mis en place depuis les années 1980 par les conservateurs au pouvoir.
En déployant la longue chaîne des choix politiques à l'origine de la catastrophe, en particulier la privatisation des services publics, il rappelle les coûts sociaux de politiques privilégiant la sécurité militaire au détriment de la sécurité sociale.