En 1842, Karl Marx publie une série d'articles concernant les débats à la Diète rhénane à propos du vol de bois. Droit de propriété, liberté de la presse, rapport du délit à la peine : tels sont les enjeux de ces articles. L'essor du capitalisme entraînait alors un déplacement de la ligne de partage entre le droit coutumier des pauvres (glanage ou ramassage du bois mort) et le droit de plus en plus envahissant des propriétaires. Deux ans plus tôt, le fameux pamphlet de Proudhon Qu'est-ce que la propriétéoe avait fait scandale en s'en prenant aux justifications libérales de l'appropriation privée. Plus d'un siècle et demi plus tard, les controverses en cours sur le brevetage du vivant, la propriété intellectuelle, le droit opposable au logement, etc., donnent aux questions théoriques et juridiques soulevées à l'époque une troublante actualité. A partir d'une lecture des articles de Marx, Daniel Bensaïd revient sur les sources philosophiques du débat pour en dégager les enjeux actuels. Aujourd'hui comme hier, les dépossédés se soulèvent contre la privatisation du monde et la logique glaciale du calcul égoïste.
Tout est encore possible est le recueil de deux entretiens. Dans le premier, Daniel Bensaïd revient sur son Mai 68, sur la création de la LCR et sur les différentes commémorations de Mai : en 1978, 1988, 1998, jusqu'au " il faut balayer Mai 68 " de Sarkozy en 2008. Daniel Bensaïd montre combien chaque commémoration dit quelque chose de son époque.
Le deuxième entretien donne à voir le regard que porte Daniel Bensaïd sur ce tout nouveau parti, le NPA, sur son candidat, Olivier Besancenot, et sur les jeunes militants.
L'ouvrage sera agrémenté de photogrammes.
Les commémorations ne sont pas nécessairement des célébrations. Celles qu'au fil des décennies Daniel Bensaïd a écrites de la Révolution russe d'Octobre 1917 et, qu'entre autres, ce livre réunit, en témoignent, qui ne ménagent pas les critiques nécessaires, lesquelles cependant altèrent moins l'événement considérable que la révolution (« temps brisé ») elle-même a été, et reste , que sa postérité terrible.
On pourrait reprendre mot pour mot, pour ce centième anniversaire de la Révolution russe ceux qu'il avait écrits pour le quatre-vingtième : « Un retour critique sur la Révolution russe, à l'occasion et sous prétexte du 80e anniversaire d'Octobre soulève quantité de questions, d'ordre tant historique que programmatique. L'enjeu est de taille. Il en va ni plus ni moins de l'intelligibilité du siècle qui s'achève, de notre capacité à sauver le passé de l'oubli pour préserver un avenir ouvert à l'agir révolutionnaire, car tous les passés n'ont pas le même avenir. » Que tous les passés n'aient pas le même avenir, ou que l'avenir dépende de ce qu'on fait des passés, a été une constante de l'activité intellectuelle et politique de Daniel Bensaïd, constante que sa lecture de Benjamin a accentuée avec le temps. Les archives s'ouvrant, les révisions abondant (qu'on se souvienne, successivement, de l'opération des dits « nouveaux philosophes » et de celle du Livre noir du communisme, sur lesquels il revient longuement dans les textes que ce livre réunit, et pour les contester), il s'est agi pour lui de distinguer encore et toujours entre l'événement incontestablement révolutionnaire qu'aura été Octobre (pas le coup d'État auquel on voudrait le réduire), et la postérité contre-révolutionnaire bureaucratique et stalinienne avec laquelle on s'emploie à le confondre, pour des raisons qui doivent moins au travail de l'historien qu'à celui de l'idéologue : «En ces temps de contreréforme et de réaction, rien d'étonnant à ce que les noms de Lénine et de Trotski deviennent aussi imprononçables que le furent ceux de Robespierre ou de Saint Just sous la Restauration. » Les temps sont toujours à la contre-réforme et à la réaction, qui se veulent sourds à ce que Arendt disait de la Révolution : « vrai événement, dont la portée ne dépend pas de la victoire ou de la défaite. »
Hannah Arendt s'inquiétait que la politique puisse disparaître complètement du monde.
Les désastres du siècle étaient tels que la question de savoir si la politique avait "encore un sens" devenait inévitable. Pour elle, le totalitarisme était la forme de cette disparition redoutée. Nous avons aujourd'hui affaire à une autre figure du péril: le totalitarisme à visage humain du despotisme de marché. La politique s'y trouve laminée entre l'ordre naturalisé des marchés financiers et les prescriptions moralisantes du capital ventriloque.
Fin de la politique et fin de l'histoire coïncident alors dans l'infernale répétition de l'éternité marchande. L'idée d'une autre société est devenue presque impossible à penser, et d'ailleurs personne n'avance sur le sujet dans le monde d'aujourd'hui. Nous voici condamnés à vivre dans le monde où nous vivons. Daniel Bensaïd, qui s'inscrit en faux contre cette problématique, tente ici de répondre à cette désespérance en portant son attention aux débats du mouvement altermondialiste, en interrogeant Marx, Lénine et les années 1970, notamment en Europe du Sud et en Amérique latine.
Il souligne tout à la fois les continuités et les ruptures, afin de donner de la profondeur théorique et historique aux controverses actuelles.
C'est un Marx profane que Daniel Bensaïd fait revivre. Un Marx libéré de l'icône religieuse qui a putréfié sa théorie du dogme. Un Marx en prise avec les misères matérielles, les servitudes familiales, avec les épreuves de l'amitié comme les passions politiques. 500 documents et une riche correspondance avec Engels, sa mère et ses proches illustrent ce livre.
L'enthousiasme politique n'est pas mort ! Si l'air du temps est la frilosité, cet ouvrage de Daniel Bensaïd, philosophe et militant insuffle l'audace et le courage pour réhabiliter l'ambition politique.
Pour menacée qu'elle soit, la politique dépend de ce que nous sommes capables d'en faire : infléchir la pente des inégalités sociales, vouloir changer le monde. Tous les mouvements sociaux sont des points d'appui pour renouveler l'action politique. Car agir au plus près de ce que le monde nous apprend est la forme la plus haute de la responsabilité sociale.
A l'injonction de la ministre des finances "assez pensé, maintenant!", ritournelle d'une époque régie par des marchés ventriloques, daniel bensaïd oppose son analyse méthodique des changements intervenus depuis la chute du mur de berlin jusqu'à la crise actuelle.
Le présent essai, qui alterne interventions politiques et réflexions théoriques, est la chronique d'une double faillite annoncée: celle d'un capitalisme dévastateur aussi bien que celle d'une gauche parlementaire reniée. alors que le capitalisme financier est entré dans une crise historique, il est aussi urgent de "penser" l'alternative que d'"agir" pour la rendre réelle.
Figure du Mouvement du 22 mars en mai 1968, puis de la LCR (Ligue communiste révolutionnaire) et du NPA (Nouveau parti anticapitaliste), Daniel Bensaïd (1946-2010) est aussi un philosophe.
Un philosophe qui a défriché des pistes originales pour un marxisme ouvert, récusant les impasses totalitaires d'hier. Au-delà même du marxisme, il a fourni une contribution majeure à une pensée de l'émancipation pour le XXIe siècle. Ce recueil de textes, allant de 1992 à 2006, offre une palette inédite des problèmes diversifiés que Daniel Bensaïd a été amené à traiter les vingt dernières années de sa vie.
Il suit le fil d'une mélancolie radicale et joyeuse, de l'obstiné " pari mélancolique " pour un autre monde contre les illusions d'une prétendue éternité du capitalisme. Quatre personnalités historiques émergent de ces sentiers anticonformistes : Auguste Blanqui, Karl Marx, Charles Péguy et Walter Benjamin. Un rapport critique au thème de " l'engagement intellectuel " se dessine. De nouvelles questions, comme celle de l'écologie politique, font leur entrée.
Daniel Bensaïd y révèle tout à la fois une profondeur philosophique, une acuité politique et un style littéraire. Ces textes ont été choisis et sont présentés par Philippe Corcuff, sociologue, ami de Daniel Bensaïd et également membre du NPA.
Fondée en 1941 par Paul Angoulvent, traduite en 40 langues, diffusée pour les éditions françaises à plus de 160 millions d'exemplaires, la collection " Que sais-je ? ", est aujourd'hui l'une des plus grandes bases de données internationales construite, pour le grand public, par des spécialistes.
La politique d'auteurs, la régularité des rééditions, l'ouverture aux nouvelles disciplines et aux nouveaux savoirs, l'universailité des sujets traités et le pluralisme des approches constituent un réseau d'informations et de connaissance bien adapté aux exigences de la culture contemporaine.
Moi, la Révolution, le coup de colère d'une victorieuse défaite, mangeuse d'hommes et femme à histoires. Un voyage passionné à travers les enjeux idéologiques de 1789 et de ce qu'on en retient.
En 1989, la Révolution venait hanter son bicentenaire. Prenant à partie sur le mode du tutoiement sans-culotte le citoyen-président, elle s'emporte contre ces festivités officielles dont elle se sent la grande absente, escamotée sur fond de conversion au réel et de régression des utopies. Contre ceux qui la voudraient terminée, cette éternelle dissidente se proclame infinie, et réplique : en finir avec Thermidor !
Irrévérencieuse et querelleuse, elle chemine entre passé et présent avec des compagnons d'infortune inattendus - Jeanne d'Arc et Charles Péguy notamment - et se livre à son examen de conscience, discutant des Droits de l'homme et de la Terreur, de la République et du Progrès, de l'Argent et de la Morale...
Le capitalisme est malade. les anticapitalistes ne sont plus les seuls à le diagnostiquer. il y a encore quelques mois, les tenants du nouvel ordre mondial n'avaient pas de mots assez flatteurs pour vanter les mérites indépassables de l'économie de marché. si c'est la soupe à la grimace pour tous ceux — patrons, banquiers et spéculateurs — qui ont vu leurs avoirs fondre comme neige au soleil, la situation est autrement dramatique pour nous, simples salariés. le monde est entré en récession à l'automne 2008. chacun sait, chez les travailleurs, les retraités, les chômeurs, au sein des familles, que des nuages noirs s'accumulent à l'horizon, et que nous allons payer la débâcle du système.
L'exaspération sociale gronde. elle peut gronder plus fort encore à la base de la société. au sommet, dans les sphères économiques et politiques, les stratèges du capitalisme ne sont pas d'accord entre eux. mais le président sarkozy et le medef s'entendent à continuer leur casse sociale... pour nous, pas d'hésitation : nous combattons le modèle défaillant de la contre-réforme néolibérale.
Renverser le capitalisme, nous le voulons. pour bâtir une nouvelle société, solidaire et réellement démocratique, nous sommes déterminés à ne plus subir, à nous regrouper et à prendre parti.
Ecrit peu après la chute du Mur et initialement paru à l'automne 1990, cet ouvrage marque un point d'inflexion majeur dans le parcours tant théorique que politique de Daniel Bensaïd.
Jusque-là absente du corpus du philosophe et dirigeant de la LCR, la pensée de Walter Benjamin s'est alors imposée à lui. Elle lui a fourni les points d'appui nécessaires à la réélaboration d'une pensée révolutionnaire et stratégique en période de défaite, au moment où le néolibéralisme hurlait au monde sa propre nécessité et annonçait imprudemment la fin de l'histoire. Il fallait rompre, alors, avec la vulgate positiviste marxiste, qui ne voyait dans l'histoire que la mécanique inexorable du Progrès.
Cette conception téléologique avait déjà fait bien des dégâts (très tôt perçus, en plein cauchemar des années 1930, par Benjamin) ; elle avait été en partie responsable de l'apathie des classes subalternes et de la bureaucratisation " communiste ". Elle était, au début des années 1990, parfaitement homogène au triomphe autoproclamé des " démocraties occidentales ". Il fallait donc, avec Benjamin, revendiquer à nouveau la charge explosive du messianisme juif, s'ouvrir à la théologie et à l'événement, et se tourner vers les vaincus de l'histoire pour les réintégrer aux forces de la révolution à venir.
Aujourd'hui, autant sinon plus qu'il y a vingt ans, ce livre de Daniel Bensaïd, en réhabilitant un Walter Benjamin politique (plutôt qu'esthète ou critique comme on le présentait alors), nous encourage à guetter le moment où la bifurcation révolutionnaire devient possible, à devenir, à notre tour, des sentinelles messianiques.
De la guerre du golfe à celle des balkans, apparaît un nouveau discours de la guerre que dénonce ici daniel bensaïd.
L'intervention militaire au kosovo a été saluée comme un événement fondateur : la victoire de l'humanité sans frontières. une grande première, donc : la " guerre éthique " désintéressée ! une histoire à dormir debout !
Pour l'auteur, cette guerre qui refuse de dire son nom se présente comme une simple descente policière de maintien de l'ordre mondial. le droit est-il désormais soluble dans la morale ? les souverainetés politiques du " droit du plus faible ", c'est en réalité la morale du plus fort qui prend le relais du droit du plus fort.
Un discours aux relents de guerre sainte ! sous le masque avenant de l'oecuménisme humanitaire, l'europe et l'amérique sont engagés dans une nouvelle course à l'hégémonie mondiale. sur ces nouveaux sentiers de la guerre, nous ne sommes pas au bout de nos surprises. le monde de demain qui s'y invente s'annonce gros de périls inédits.
Au départ il s'agit d'un projet, diffusé sur la radio Fréquence Paris Plurielle (106,3 FM).
Au cours de deux séances d'enregistrement en 2007 et 2008, Daniel Bensaïd se prête à un exercice radiophonique. Autour de 12 dates, souvent associées à des figures marquantes du mouvement ouvrier, il donne à entendre sa vision des évènements : Révolution d'octobre, guerre d'Espagne, assassinat de Lumumba, Chili 73,... chute du mur de Berlin.
Ces12 dates retracent un « court vingtième siècle », avec des choix nécessairement partiels et partiaux. On entend, ou plutôt on lit, certaines des principales analyses qui structurent la pensée de Daniel Bensaïd, mais aussi celle d'une partie de la gauche radicale en ce tout début de 21ème siècle.
Exercice passionnant, Daniel Bensaïd y déploie un récit foisonnant de réferences et d'expériences personnelles. Lui, à qui "l'histoire a mordu la nuque" reste capable de nous embarquer avec autant d'érudition que de chaleur dans l'histoire et ses bifurcations pour penser la suite : « on entre dans une nouvelle étape, mais dans cette nouvelle étape, selon une formule qui m'est chère, on recommence par le milieu, on ne recommence pas à zéro ».
Pour poursuivre l'aventure, 10 ans après la disparition du militant philosophe, nous avons demandé à certains amis de réagir à ces enregistrements : entre héritage, dette intellectuelle et politique ils et elles nous disent comment continuer à penser nos luttes pour l'émancipation dans un monde qui a définitivement basculé dans un autre siècle.
Les entretiens ont été mis en forme par Pierre Barron, Marion Druart, Guillaume Garel et Gwenn Sanchez.
La politique est d'abord affaire d'espace et de temps. Chaque époque se définit ainsi par les coordonnées spatiales et temporelles qui s'imposent aux hommes et déterminent leur liberté d'agir. Tel est le point de départ de cet essai, tourné vers la compréhension des conditions dans lesquelles nous pouvons prétendre changer le monde.A quoi assistons-nous aujourd'hui? Les espaces de l'économie, de l'écologie, du droit, de l'information se chevauchent et se contrarient. Les temps de la production, de la circulation, des messages s'enchevêtrent et se contredisent. Dans ce dérèglement général, les repères familiers de la souveraineté et de la représentation se dérobent, les promesses de progrès s'obscurcissent. Ces métamorphoses appellent une redéfinition de l'échelle et des rythmes de l'action publique.Suspendue entre déjà plus et pas encore , l'époque hors de ses gonds connaît une transformation des procédures guerrières. Elle voit naître une nouvelle figure de l'étranger. Elle s'égare devant l'énigme géopolitique de l' humanité européenne . Agir au plus près de ce monde nouveau, sans les garanties illusoires de la Providence divine, de l'Histoire universelle ou de la Science toute-puissante, exige un sens profane de la responsabilité indissociablement éthique et politique. Aux certitudes de la foi ou de la raison succèdent les incertitudes humaines du parieur mélancolique, compagnon de jeu de Pascal et de Mallarmé. Car il est mélancolique, et pourtant nécessaire, ce pari sur les possibles contre le sens unique du réel et la résignation à ses contraintes.Daniel Bensaïd est maître de conférences de philosophie à l'université de Paris-VIII. Il a publié plusieurs ouvrages, parmi lesquels Walter Benjamin, sentinelle messianique (1990), Jeanne, de guerre lasse (1991), Marx l'intempestif (1995), La Discordance des temps (1995).
Dans cet ouvrage inédit, le dernier auquel il aura travaillé, Daniel Bensaid établit, en philosophe, la généalogie du désespoir révolutionnaire et de ce qu'il appelle le " nihilisme de la renonciation " tels qu'ils s'inscrivent, selon lui, au coeur même de la pensée intellectuelle radicale, dès les années 1960.
Car c'est bien à une sorte de " front secondaire " que le philosophe et militant inlassable qu'il fut entreprend ici de s'opposer : le front de ceux qui s'emploient à démontrer - fût-ce pour le déplorer - que le capitalisme ne connaît aucun dehors et sa domination, aucune limite (Marcuse, Debord, Baudrillard...). À ces thèses - ici décrites et analysées dans le détail -, Daniel Bensaïd oppose une nouvelle fois le " principe espérance " d'Ernst Bloch, et la nécessité stratégique d'accorder toute leur importance aux " refus divers ", ceux appelant à un monde autre, même si aucun grand récit ne permet plus d'en définir le sens.
" Penser politiquement, c'est penser historiquement. C'est concevoir le temps politique, comme un temps brisé, discontinu, rythmé de crises. C'est penser la singularité des conjonctures et des situations. C'est penser l'événement non comme miracle surgi de rien mais comme historiquement conditionné, comme articulation du nécessaire et du contingent, comme singularité politique ".
« Ce livre noea doeautre ambition que doeaider à comprendre un itinéraire politique et philosophique, après le désastre du stalinisme, à l?époque de loeapothéose marchande, lorsque les hiéroglyphes de la modernité livrent leurs secrets au grand jour. » Philosophe et militant de la Ligue communiste, Daniel Bensaïd revient sur un parcours où loeindividuel et le collectif interfèrent sans cesse. Alternant le « je » et le « nous », les souvenirs singuliers et les expériences partagées, il inscrit sa trajectoire personnelle, assumée sans complaisance, dans une histoire politique qui commence au milieu des années 1960.
Des années de formation toulousaines dans le bistro familial « rouge vif » à la fondation des Jeunesses communistes révolutionnaires, des débats à loeENS de Saint-Cloud aux meetings de Nanterre, de « loeaffaire non classée » de 1968 à loeexpérience douloureuse des luttes en Argentine, de la relecture de Marx à la « piste marrane », des combats doehier à ceux doeaujourdoehui, il raconte une révolte obstinée qui a dû apprendre la durée.
Une lente impatience, tendue entre action et réflexion, qui se révèle aussi dans le plaisir doeune écriture vive.
Contre la rhétorique cynique de la résignation, Daniel Bensaïd invite ici à la contre-attaque en 5 théorèmes.
Ces "insolubles" et ces "irréductibles" constituent une critique à coups de marteau du jargon post-moderne et de ses nouvelles idoles de cendre. Un solide mode d'emploi pour ne pas se rendre à la mode et pour ne pas céder à l'air du temps, celui de la contre-réforme libérale, d'une époque opaque de passage entre deux mondes, entre chiens et loups, entre un passé en ruine et un avenir incertain. La griserie de l'instant sans lendemain et la dissolution de la politique dans l'esthétique désenchantée sont au goût du jour.
Il serait illusoire, dans l'affaissement du vieux mouvement ouvrier, de se cramponner à quelques formules polémiques éprouvées. Daniel Bensaïd refuse de conserver pieusement un capital doctrinaire. Il enrichit et transforme sa vision du monde à l'épreuve de pratiques renouvelées. Si tout est à refaire, la table n'est pas rase.
La mondialisation de l'époque victorienne avait eu pour contrepartie la fondation de la Première Internationale.
La mondialisation libérale s'accompagne d'une globalisation planétaire des résistances, dont témoignent les contre-sommets de Porto Alegre ou de Gênes, les manifestations de Seattle ou de Florence, la multiplication des Forums sociaux par régions ou continents. Depuis une quinzaine d'années, un nouvel internationalisme prend ainsi son essor. Il s'oppose aussi bien au cosmopolitisme marchand qu'aux replis " souverainistes " et aux " paniques identitaires ".
Rassemblant syndicats ouvriers ou paysans, mouvements écologistes et féministes, organisations non gouvernementales et mouvements culturels, clubs de réflexion et réseaux de revues, ce mouvement confronte pour la première fois les traditions anciennes du socialisme européen ou nord-américain aux expériences plus récentes d'Asie, d'Afrique ou d'Amérique latine.
" Un autre monde est possible ! " est devenu le cri de ralliement des manifestations et des forums sociaux contre la mondialisation impérialiste.
Il exprime le refus d'un monde où les dérèglements écologiques s'ajoutent aux dérèglements sociaux et aux incertitudes quant à l'usage des technologies nouvelles. La nécessité de changer cet univers impitoyable est de plus en plus partagée. La possibilité d'y parvenir reste en revanche hypothétique, tant est lourd le passif hérité du siècle écoulé. Quels acteurs du changement, quelles stratégies de transformation, quelles ébauches d'alternatives ? Divisions sociales et alliances, pouvoirs et contre-pouvoirs, expertise et engagement, classes et multitudes : ces débats au point mort depuis les années 1970 Sont aujourd'hui relancés et revêtent une dimension internationale.
Le présent livre a pour but d'y contribuer. Il prolonge le précédent, également publié par les éditions Textuel, sur Le Nouvel Internationalisme (2003).
Homme de doute opposé à l'homme de foi, le mécréant parie
sur les incertitudes du siècle, sans les rassurantes rigueurs de la
règle. Il met une énergie absolue au service de certitudes relatives.
C'est aussi son dilemme. Résister, lutter, ne pas céder à la lassitude
ou à la résignation. Brosser l'histoire à rebrousse-poil, inlassablement.
Les Fragments mécréants que nous donne ici Daniel Bensaïd
dessinent des lignes de résistance qui ne cèdent pas à la niaiserie
du retour au giron de l'église, de la mosquée, ou de la yeshiva. Ce
travail de déniaisement suppose une relance et un approfondissement
de la mécréance, un corps à corps profane avec nos fétiches cachés,
une critique implacable de la tentation de croire.
« Je sais que tu m'attendais... Mais tu n'auras que ma voix. Les images m'ont joué trop de mauvais tours. Pourquoi maintenant ? Parce que le pire, c'est d'être annexée par ceux-là mêmes qui m'ont persécutée. Et qui osent prétendre que mon martyre fut mon apothéose ! M'abandonner à mes vainqueurs, ce serait perpétuer mon bûcher. Vous n'allez pas me laisser à Le Pen ? ».
Sous la plume de Daniel Bensaïd, nous revient une figure familière, suspendue entre histoire et légende : Jeanne d'Arc. Du 8 mai, anniversaire de son triomphe, au 30 mai, anniversaire de son supplice, Jeanne s'en vient ainsi visiter notre époque incertaine où s'émoussent les convictions et renaissent les fanatismes. Vingt-trois nuits de dialogue complice et enchanteur, où s'entremêlent politique et philosophie, foi et hérésie, droit et force, guerre et paix. Vingt-trois, comme les heures d'une journée trop tôt interrompue d'une vie inachevée.
Magnifique lieu et enjeu de mémoire, où s'éprouvent inlassablement les passions de l'épopée nationale, Jeanne séduit parce qu'elle incarne ce principe de résistance universelle qui anime la grande fraternité des vaincus. En des temps tortueux, elle est toute droiture. En des temps de bavardage médiatique, toute justesse de parole.
L'effondrement des dictatures de l'Est européen n'est pas seulement une bonne nouvelle politique. C'en est une aussi pour la pensée, et notamment pour la tradition critique qui, depuis des siècles, travaille à mettre au jour le fondement du règne de la marchandise. Marx fut longtemps considéré comme le plus perspicace analyste de ce pouvoir-là. Et puis le dogmatisme s'empara de sa légende, lui construisit un mausolée, et annexa son oeuvre.Que l'on n'attende pas pour autant de ce livre la révélation d'une pensée pure, enfin débarrassée de ses scories politiques. Car à y regarder de près, il apparaît clairement que Marx aura passé sa vie à se chamailler avec son ombre, à se débattre avec ses propres spectres. Et il s'agit bien moins ici d'opposer un Marx originel à ses contrefaçons que de secouer le lourd sommeil des orthodoxies afin de dégager la cohérence théorique d'une entreprise critique dont l'actualité ne fait pas de doute: le fétichisme marchand n'a-t-il pas conquis jusqu'aux confins de la planète?En montrant d'abord ce qu'à coup sûr la pensée de Marx n'est pas: ni une philosophie de la fin de l'histoire, ni une sociologie empirique des classes annonçant l'inévitable victoire du prolétariat, ni une science propre à mener les peuples du monde sur les chemins de l'inexorable progrès. Ces trois critiques _ de la raison historique, de la raison économique, de la positivité scientifique _ se répondent et se complètent. Elles sont au coeur de l'entreprise critique de Marx, et forment donc logiquement l'armature de ce livre.En expliquant ensuite, et du même mouvement, à quoi peut servir aujourd'hui la relecture des grands textes (Le Capital surtout), en quoi ils contribuent à répondre aux interrogations contemporaines sur le sens de l'histoire et la représentation du temps, sur le rapport qu'entretiennent les contradictions sociales et les autres modes de conflictualité (selon le sexe, la nationalité, la religion), sur la validité du modèle scientifique dominant, ébranlé par les pratiques scientifiques elles-mêmes.De ce Marx intempestif _ n'hésitant pas à rompre en son temps avec les canons scientifiques et politiques les plus largement partagés, ressuscité quand on croyait ses cendres définitivement dispersées _, il fallait dresser le bilan après inventaire. Voilà qui est fait avec science, esprit de suite et verve critique.Daniel Bensaïd est maître de conférences de philosophie à l'université de Paris-VIII. Il a publié plusieurs ouvrages, parmi lesquels: Moi, la Révolution, remembrances d'un bicentenaire indigne (Gallimard, 1989), Walter Benjamin, sentinelle messianique (Plon, 1990), Jeanne, de guerre lasse (Gallimard, 1991), La Discordance des temps (Editions de la Passion, 1995).