«Le monde magnifique et horrible de Mariana Enriquez, tel qu'on l'entrevoit dans Les Dangers de fumer au lit, avec ses adolescents détraqués, ses fantômes, les miséreux tristes et furieux de l'Argentine moderne, est la découverte la plus excitante que j'ai faite en littérature depuis longtemps».
Kazuo Ishiguro, Prix Nobel de littérature.
Peuplées d'adolescentes rebelles, d'étranges sorcières, de fantômes à la dérive et de femmes affamées, les douze histoires qui composent ce recueil manient avec brio les codes de l'horreur, tout en apportant au genre une voix radicalement moderne et poétique. Si elle fait preuve d'une grande tendresse envers ses personnages, souvent féminins, des êtres qui souffrent, qui ont peur, qui sont opprimés, Mariana Enriquez scrute les abîmes les plus profonds de l'âme humaine, explorant de son écriture à l'extraordinaire pouvoir évocateur les voies les plus souterraines de la sexualité, du fanatisme, des obsessions.
La cour est vide. La maison est fermée. Claire sait où est la clef, sous une ardoise, derrière l'érable, mais elle n'entre pas dans la maison. Elle n'y entrera plus. Elle serait venue même sous la pluie, même si l'après-midi avait été battue de vent froid et mouillé comme c'est parfois le cas aux approches de la Toussaint, mais elle a de la chance ; elle pense exactement ça, qu'elle a de la chance avec la lumière d'octobre, la cour de la maison, l'érable, la balançoire, et le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu.
Années 1960. Isabelle, Claire et Gilles vivent dans la vallée de la Santoire, avec la mère et le père. La ferme est isolée de tous.
Sublime roman [...] Harlem Shuffle est un page turner comme Colson Whitehead sait si bien en faire. Livres HebdoPetites arnaques, embrouilles et lutte des classes... La fresque irrésistible du Harlem des années 1960.Époux aimant, père de famille attentionné et fils d'un homme de main lié à la pègre locale, Ray Carney, vendeur de meubles et d'électroménager à New York sur la 125e Rue, « n'est pas un voyou, tout juste un peu filou ». Jusqu'à ce que son cousin lui propose de cambrioler le célèbre Hôtel Theresa, surnommé le Waldorf de Harlem...Chink Montague, habile à manier le coupe-chou, Pepper, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, Miami Joe, gangster tout de violet vêtu, et autres flics véreux ou pornographes pyromanes composent le paysage de ce roman féroce et drôle. Mais son personnage principal est Harlem, haut lieu de la lutte pour les droits civiques, où la mort d'un adolescent noir, abattu par un policier blanc, déclencha en 1964 des émeutes préfigurant celles qui ont eu lieu à la mort de George Floyd.Avec Harlem Shuffle, qui revendique l'héritage de Chester Himes et Donald Westlake, Colson Whitehead se réinvente une fois encore en détournant les codes du roman noir. C'est vivant, bruyant, caracolant. C'est Whitehead. L'Obs Un réjouissant tourbillon [...] Une belle leçon d'histoire et d'humanité en mode thriller. Les Echos
:Les téléphones n'étaient alors ni intelligents ni mobiles, les voitures pas encore hybrides. C'étaient les années 1970 et un jeune homme partait en stop sur les routes d'Europe. Pour se découvrir, pour l'aventure et pour trouver l'âme soeur. Au hasard de ses voyages, saupoudrés de rock plus ou moins dur et de drogues plus ou moins douces, il collectionne les rencontres, dort en prison, fait fumer un joint à un aumônier.
Mais Kerouac est mort en 1969, et « partir c'est partir loin et partir loin c'est revenir ». Cette chronique gentiment déjantée d'un monde parallèle où l'auto-stop pouvait emporter très loin ses serviteurs est d'une irrésistible drôlerie.
Tiens-toi bien !, récit littéraire à caractère intime, raconte une vie de femme artiste, libre et irrévérencieuse. Sally Mann a lutté contre la censure du puritanisme américain des Trente Glorieuses et a célébré la liberté d'expression. Depuis le succès de la rétrospective Sally Mann au Musée du Jeu de Paume, on connaissait la photographe, on découvre l'écrivaine.
Ce texte autobiographique richement illustré par les photos de l'artiste et des archives personnelles inédites, célèbre, entre autres, les thèmes de l'éco-féminisme, du nature-writing, de la famille et de l'enfance en liberté. On découvrira une existence inspirante racontée par une plume sensible, littéraire et narrative. On pense à Just Kids de Patti Smith (verbatim en bande du livre), aux récits de Joan Didion. Véritable best-seller aux États-Unis avec plus de 100 000 exemplaires vendus, Tiens-toi bien ! est le premier livre de texte traduit en France de cette artiste protéiforme d'exception.
"Je crois que je n'aime plus mon mari." Ainsi s'ouvre le journal dans lequel Jeanne raconte les désillusions de sa vie avec Philippe. Au fil des pages, elle observe ses congénères masculins, époux en tête; note les conversations qu'elle tient avec collègues et amies au sujet de l'amour; et livre une réflexion sans dogmatisme ni discours idéologique sur la condition des femmes et leurs relations aux hommes, "dans un mélange d'acuité impitoyable et d'espoir obstiné" (Mona Chollet).
Bienvenue à Bournville, charmante bourgade proche de Birmingham connue pour sa célèbre chocolaterie. C'est à l'occasion de la victoire de mai 1945 que nous y rencontrons la petite Mary Clarke, émerveillée par les festivités organisées autour de sa maison. Elle y croise alors le chemin d'un certain Geoffrey Lamb, fils d'un collègue de son père travaillant aussi dans l'usine de chocolat. Nous retrouvons Mary et Geoffrey en 1953, fiancés et fascinés par le couronnement de la reine Élisabeth II que leurs familles respectives regardent ensemble sur le premier poste de télévision de Bournville. Treize ans plus tard, le couple a trois fils épris de football, qui s'extasient devant le match opposant les Anglais aux Allemands lors de la Coupe du monde de 1966. Nous les verrons à leur tour grandir et tracer leurs routes au fil de l'investiture du prince de Galles, du mariage de Charles et Diana, de la mort de cette dernière, de l'arrivée de Boris Johnson en politique, pour finalement retrouver Mary lors du 75? anniversaire de la Victoire, en plein confinement.En sept parties scandant les sept temps majeurs de l'histoire de l'Angleterre moderne, Le royaume désuni mêle brillamment les destins d'un pays dysfonctionnel, d'une irrésistible famille anglaise et d'une chocolaterie.Jonathan Coe signe ici un roman de grande ampleur dans la lignée si charming et piquante de Testament à l'anglaise et du Coeur de l'Angleterre.
Jean est seul, caché par quelques pierres sur le flanc de la montagne. La colonne de blessés et les derniers maquisards rescapés ont dû le laisser là. Amputé de la jambe gauche quelques jours plus tôt, il les retardait trop. Il a mal, peur et soif. Alors il se raccroche au souvenir de sa jeune femme, à sa fille qui vient de naître et qu'il ne connaît pas encore. Il ne regrette pas vraiment de s'être engagé, mais quand même, il n'avait pas imaginé ça. La mort, il y a pensé, bien sûr. Mais on fait quoi, estropié, unijambiste à vingt-trois ans ? Jean regarde le soleil se lever, il est si beau sur la montagne ce matin encore.
Cinquante ans après la mort d'un père qu'il a à peine connu, Laurent Seyer lui offre une nouvelle vie et, par le prodige du roman, comble les blancs laissés par la mémoire.
Cet ouvrage pre´sente des drames maritimes au de´nouement heureux. En une quarantaine de vignettes dote´es d'une forte puissance suggestive, il rapporte les actes salvateurs accomplis par des gens ordinaires.
De Noume´a a` Douarnenez, de la Vende´e aux co^tes provenc¸ales, au large ou sur les plages, il relate des incidents brie`vement archive´s dans les Annales du sauvetage maritime entre 1891 et 1931 : les gestes d'individus qui, parce que la mer le demande partout et toujours, sont alle´s sans y penser porter secours a` leur prochain.
A` conside´rer cet ensemble de re´cits minuscules, Philippe Artie`res propose l'e´bauche d'une « histoire du moindre », une histoire du bas bruit profonde´ment arrime´e au quotidien et au sens commun, qui vient questionner la fabrique de l'e´ve´nement et des he´ros.
Lors d'une opération de maintenance dans la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine, Frédéric Weissman, un technicien d'une trentaine d'années, commet une erreur de manipulation au cours d'une procédure de sécurité. Mais cette erreur, qui va provoquer l'accident nucléaire le plus important de l'histoire, est loin d'être involontaire. C'est un geste politique, le premier acte d'un attentat de grande envergure lancé par un groupe organisé d'écologistes extrémistes.
Convaincus que les gouvernants sont incapables de répondre à la crise environnementale et que le péril pour l'humanité est désormais imminent, ils ont décidé de passer à l'action violente pour mettre un coup d'arrêt à la croissance industrielle et provoquer l'effondrement du pays par une opération qui va pousser ses ramifications jusqu'au coeur de Paris.
Ces pages saisissantes de réalisme sont tout autant un récit plein d'une froide fureur qu'une plongée dans la nébuleuse et la psychologie de l'écoterrorisme.
Mitteleuropa, Deuxième Guerre mondiale, fuite au Brésil :Willibald est la reconsitition d'une histoire familiale toxique et pleine de trous dans une écriture à l'os, limpide et précise.
Depuis l'adolescence Mara est habitée par un tableau suspendu dans le salon de son H.L.M. Willibald, qui a acheté cette toile dans les années 1920, la hante tout autant. Lorsqu'il fuit Vienne en 1938, il n'emporte que ce Sacrifice d'Abraham, soigneusement plié dans sa valise. Entrepreneur et collectionneur juif, il refait sa vie au Brésil, loin des siens. Lors d'un séjour en Toscane chez sa mère Antonia, Mara déchiffre les lettres de Willibald qu'elle retrouve dans un hangar. Elle observe les photos, assaille de questions Antonia, « qui sait mais ne sait pas ».
Autrefois, Zem Sparak fut, dans sa Grèce natale, un étudiant engagé, un militant de la liberté. Mais le pays, en faillite, a fini par être vendu au plus offrant, malgré l'insurrection. Et dans le sang de la répression massive qui s'est abattue sur le peuple révolté, Zem Sparak, fidèle à la promesse de toujours faire passer la vie avant la politique, a trahi. Au prix de sa honte et d'un adieu à sa nation, il s'est engagé comme supplétif à la sécurité dans la mégalopole du futur. Désormais il y est «chien» -c'est-à-dire flic - et il opère dans la zone 3, la plus misérable, la plus polluée de cette Cité régie par GoldTex, fleuron d'un post-libéralisme hyperconnecté et coercitif. Mais au détour d'une enquête le passé va venir à sa rencontre.
Avec "Chien 51", Laurent Gaudé s'aventure dans le "futur" ; à la fois lyrique, philosophique et tragique, politique aussi, c'est toujours l'homme qu'il questionne.
« Comment l'appeler ?
Je dis Anne, mais cette fausse intimité me met mal à l'aise. Je ne peux pas dire Anne, quelque chose m'en empêche, qui, au cours de la nuit, se matérialisera par l'impossibilité de rester dans sa chambre. Alors je dis Anne Frank, comme on évoque l'ancienne élève brillante d'un collège fantomatique. Deux syllabes.
Anne Frank, une histoire que « tout le monde connaît » tellement qu'il n'en sait pas grand-chose. Car « tout le monde connaît » ne dit pas que « tout le monde sait », mais qu'on est pressé de passer à autre chose, de le ranger au Musée, ce petit fantôme.
La Maison Anne Frank est un appartement vide. C'est l'absence de ses habitants devant laquelle les visiteurs défilent. C'est le vide qui transforme cet appartement, l'Annexe, en musée. Mais le vide n'existe pas. Il est peuplé de reflets qui témoignent de l'abîme, celui de la disparition d'Anne Frank.
Toute la nuit, j'irai d'une pièce à l'autre, comme si une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »
En Californie, une adolescente noire est décidée à survivre, coûte que coûte, dans un monde qui se refuse à la protéger. Un premier roman coup de poing.
Kiara, dix-sept ans, et son frère aîné Marcus vivotent dans un immeuble d'East Oakland. Livrés à eux-mêmes, ils ont vu leur famille fracturée par la mort et par la prison. Si Marcus rêve de faire carrière dans le rap, sa soeur se démène pour trouver du travail et payer le loyer. Mais les dettes s'accumulent et l'expulsion approche.
Un soir, ce qui commence comme un malentendu avec un inconnu devient aux yeux de Kiara le seul moyen de s'en sortir. Elle décide de vendre son corps, d'arpenter la nuit. Rien ne l'a pourtant préparée à la violence de cet univers, et surtout pas la banale arrestation va la précipiter dans un enfer qu'elle n'aurait jamais imaginé.
Un roman à la beauté brute, porté par la langue à fleur de peau de Leila Mottley.
Gaspar est un artiste reconnu et sollicité. Pourtant, en ce début de printemps, il ne rêve que de quitter Paris, et de s'installer quelques jours place Campo de' Fiori à Rome. Là, à une terrasse de café, devant un jeu d'échecs, il joue contre des badauds de passage et savoure la beauté des jours.
Un matin, une femme s'installe à sa table pour une partie. Elle s'avère être une adversaire redoutable et gagne très vite. Elle s'appelle Marya, vient de Hongrie. L'histoire entre eux naît sur l'échiquier, avant de se déployer ailleurs avec douceur.
Sous l'ombre tutélaire du grand Giordano Bruno dont la statue pèse sur le Campo de'Fiori, Marya et Gaspar vont se révéler - dans le creuset de leurs énigmes, de leurs esprits vifs et volontiers joueurs, de leurs regards singuliers et acérés sur le monde.
L'amour s'impose alors, implacable comme une attaque de mat.
Partie italienne, nouveau roman d'Antoine Choplin, ne revendique rien, ne prend aucun parti, ne défend aucune cause.
Prédominent, au fil des pages, la légèreté de l'existence et la puissance de la mémoire.
Simon Parcot est écrivain et philosophe. L'année de ses vingt ans, un drame l'envoie sur les routes : il part sur les chemins de Compostelle et de Stevenson en soli taire, marche en Himalaya puis revient en France vivre dans la vallée sauvage du Vénéon (Oisans). La montagne et son univers lui inspirent Le Bord du monde est vertical, son premier roman.
«Madame, J'ai bien reçu votre lettre datée du 5 avril m'informant que ma candidature au poste de professeur de français et de philosophie au lycée de Tachkent (Ouzbékistan), en dépit de ses nombreuses qualités, n'avait pas été retenue. J'ai pris acte de vos regrets et de votre respect profond. Je suis cependant moi-même au regret le plus sincère de vous informer que je ne peux accepter votre refus. Ma décision est irrémédiable : je prendrai le poste, il faut que vous en soyez convaincue.» Car il existe certaines circonstances qui imposent qu'une femme d'une trentaine d'années s'embarque avec son mari et ses deux enfants dans l'aventure de l'exil en terres ouzbeks.
Tiphaine Le Gall, dans ce roman épistolaire à une seule voix, nous raconte un rêve d'ailleurs et de renouveau. Au fil de cette lettre inattendue et sensible se dessinent les hésitations et les espoirs d'une jeune femme partagée entre les élans de son coeur et ses doutes, résolue à faire de sa vie un roman.
France, milieu du XIXe siècle. Voici l'étonnante histoire d'Augustin Mouchot, fils de serrurier de Semur-en-Auxois, obscur professeur de mathématiques, devenu inventeur de l'énergie solaire grâce à la découverte d'un vieux livre dans sa bibliothèque. La machine qu'il construit et surnomme Octave séduit Napoléon III et recueille l'assentiment des autorités et de la presse. Elle est exhibée avec succès à l'Exposition universelle de Paris en 1878. Mais l'avènement de l'ère du charbon ruine ses projets que l'on juge trop coûteux. Après moult péripéties, dans un ultime élan, Mouchot tente de faire revivre le feu de sa découverte sous le soleil d'Algérie. Trahi par un collaborateur qui lui vole son brevet, il finit dans la misère, précurseur sans le savoir d'une énergie du futur.